Restauration des peintures murales
Travaux réalisés en avril et mai 2001
Cette page est issue du rapport de ;
- Juliette Rollier-Hanselmann
Conservation-Restauration de tableaux de chevalet et de peintures murales
Port. 06.82.07.49.27
avec la collaboration de :
- Julien Assoun (diplômé MST, Université Paris I)
- Gaëlle Cavalier (DEA arts plastiques, Université de Toulouse)
- Charlotte Trouiller (étudiante IFROA, Paris)
suite à la demande de :
- M. Frédéric Didier, Architecte en Chef,
- M. Lavenir, Maire de Saint-Maurice
Description de l'édifice et des peintures :
L'ancienne église romane de Saint-Maurice-lès-Châteauneuf, autrefois dédiée à Saint-Benoît, fut désaffectée en 1854. La nef a été démolie, si bien qu'il ne reste que l'abside, une travée de chœur et le clocher. Le reste d'une chapelle privée, accolée au nord, était dédiée à Notre-Dame de Pitié. Celle-ci est d'époque postérieure à l'époque romane.
Etat du Cul-de-Four avant...
et après intervention
Consolidation des poches d’enduit décollées du mur
L'abside est ornée d'une peinture en trompe l'oeil. Dans le cul-de-four nous voyons un ciel nuageux sur fond vert clair, d'où s'envole la colombe. Deux colonnes à chapiteau ionique soutiennent un grand entablement. Entre les colonnes des tentures blanches, à plis gris, ferment l'espace. De part et d'autre, des faux-appareils roses et jaunes remplissent les parois.
Le décor, de facture très simple, ressemble à celui de Saint-Vincent-des-Prés, tout en étant plus simple et d'une technique moins élaborée. A Saint-Vincent, les faux-appareils sont ornés de faux-marbre et la technique picturale est plus "grasse" (ajout d'un liant gras du type caséine, huile ?). A Saint-Maurice, il s'agit d'une peinture à détrempe sur badigeon de chaux teintée.
Etant donné qu'aucun élément stylistique précis ne permet d'avancer une date précise, nous situons ce décor au XIXe s. Un claveau situé sur une assise, face à l'abside, porte la date de 1820, et nous indique une époque de réfection. Une autre date, 1716, est située sur la porte, élément récupéré de l'ancienne nef.
Le mobilier de Saint-Maurice a été transféré dans la nouvelle église, située en contrebas, notamment un "Christ en croix" et deux statues polychromes du XVIe s. R. Oursel donne des indications intéressantes concernant l'édifice, notamment concernant la visite par Mgr de Lort de Sérignan de Valras, évêque de Mâcon, le 21 juillet 1746; le procès-verbal rédigé lors de son passage en donne une longue description. II donne les dimensions précises de la nef (40 pieds de longueur et 20 de large), son plafond était lambrissé. Parmi l'inventaire du mobilier, il y avait notamment un retable baroque servant de maître-autel, qui a disparu depuis. "Le tabernacle est une caisse de bois peint à moulures et ornements dorés, à trois faces, ornée pour le devant de deux colonnes torses de chaque côté et d'une portière sculptée d'une croix avec le Christ en relief. Les faces sont ornées d'une niche, dans l'une desquelles il y a une statue en relief de saint Benoît et dans l'autre de saint Maurice, le tout terminé par deux colonnes torses... au-dessus est la niche du Saint-Sacrement, consistant en une couronne impériale dont les ornements sont dorés, ornée de trois cintres reposant par derrière sur un panneau peint en bleu et semé de fleurs de lis d'or en demi-relief, à deux pilastres sculptés et deux petites consoles dorées et peintes en partie; le tout est surmonté d'un globe peint avec une croix en relief au-dessus..., statue de la Sainte Vierge d'un pied de hauteur, propre et en état". Le tableau qui sert de retable est posé contre le mur, au-dessus du tabernacle; il représente l'Annonciation de la Sainte Vierge..." Le procès-verbal décrit ensuite les quatre chapelles latérales de l'église.
Le procès verbal ne signale pas les peintures murales, ce qui porte à croire qu'elles ont été réalisées plus tardivement, probablement au moment du démantèlement du riche mobilier XVlle s.
Etat des peintures murales :
- Etat du support :
- très importantes cloques ouvertes, très nombreuses poches d'enduit fragiles; de nombreuses infiltrations d'eau ont progressivement désagrégé les enduits en profondeur, rendant les consolidations difficile (pénétration des produits difficile dans une support "en bouillie").
- Environ un tiers du décor de l'abside a disparu, les enduits étant tombés suite aux infiltrations d'eau. Seule la partie centrale était conservée.
- Les infiltrations d'eau continues ont véhiculé des substances diverses qui ont imprégné les enduits et se sont parfois déposées en surface des peintures (voile blanc dû à la présence de sels, zones assombries par les infiltrations d'eau sâle, etc.)
- Etat de la couche picturale :
- la couche picturale était fortement fragilisée et présentait divers dégâts : pulvérulence généralisée des couleurs, déplaquements superficiels de matière, micro-boursouflures sous l'effet des sels, nombreuses petites lacunes.
Partie droite de l’abside, avant...
et après intervention
Traitement effectué :
- Traitement du support :
- Consolidations des enduits par injections de coulis et mise sous presse (coulis PLM et coulis chaux-chamotte),
- Ragréages des lacunes (enduit chaux grasse-sable).
- Traitement de la couche picturale :
- Refixage des soulèvements locaux (boursouflures, etc.) au moyen d'injections superficielles, avec deux produits, selon la nécessité :
- Primai AC 33 à 5 % et 10 %, remise en place de l'écaille à travers un Mélinex
- Primai AC 33 à 10 % + charge de chaux grasse, pour les zones de décohésion superficielle de l'enduit
- NB: la pérennité des retouches ne peut être assurée dans les parties basses en raison de la présence de jointoyage au ciment à l'extérieur des murs (ce qui occasionne des retenues d'eau dans les murs).
- Refixage généralisé des retouches (pulvérisation de Paraloid B72 à 2,5 % dans le xylène).
Partie centrale de l’abside, avant...
et après intervention
Nettoyage de la couche picturale en cours
- Nettoyage de la couche picturale (systèmes à sec)
- Refixage généralisé (pulvérisation de Paraloid B72 à 5 % dans le xylène)
- Réintégration picturale: toutes les retouches ont été effectuées selon une technique proche de la technique originale. Pour obtenir le même aspect "velouté" de surface, nous avons adopté une technique à la chaux teintée, suivie de finitions à l'aquarelle.
Partie centrale de l’abside avant...
et après intervention
Le soubassement souffre continuellement des remontées d’eau dans les murs, d’où la présence de zones plus sombres.
Pour la restitution des décors manquants, nous avons appliqué différentes couches de préparation (chaux teintée), en différentes tonalités, de façon à respecter les nuances de la peinture ancienne. Nous avons ensuite "vieilli" les retouches selon différents procédés (glacis d'aquarelle, usures par frottement dans les grandes lacunes, etc.)
Le soubassement gris, souffrant fortement des remontées d'eau par capillarité, a été retouché aux pigments secs, additionnés de Primai AC 33.